Maitre Cheng Yen, ma question porte sur la façon de mettre la compassion en action... mais, s'il vous plait, permettez-moi d'abord de m'expliquer.
L'autre jour, après que je sois arrivée à Taïwan, nous étions au bord de la mer et nous avons vu un marchand ambulant qui vendait des saucisses qu'il cuisait sur place. A part le marchand, il y avait plusieurs clients qui mangeaient et parlaient tout en marchant autour du stand.
Il y avait là aussi un chien. Sa peau était mangée par la gale. Ses côtes saillaient sous sa peau nue. Il avait de grands yeux humides qui fixaient les saucisses pendant du rotissoir. Il humait le parfum, sa gueule ouverte révélait une langue rose humide de salive.
Quand le chien s'approchait, aucun des hommes présents n'hésitait à lui donner un coup de pied. Cela leur semblait une chose toute naturelle. Ils levaient simplement le pied et l'abattait sur le chien tout en riant et en se réjouissant de leur nourriture.
Cela devait lui faire vraiment mal, car le chien gémissait longtemps, une plainte qui venait du plus profond de son corps.
Maître, je partageais la misère de ce chien. Je pouvais sentir sa faim, sa douleur et son agonie. Je pouvais presque l'entendre demander : "Je ne suis pas un mauvais chien, pourquoi vous tous, vous me rejetez comme cela ? pourquoi aucun d'entre vous ne me donne-t-il pas un petit morceau de quelque chose ?"
Maitre, je voulais acheter des saucisses pour ce chien, mais j'étais retenue par des questions qui tournaient dans ma tête: qu'est-ce que les gens penseraient de moi ? Riraient-ils de moi ? penseraient-ils que je suis folle puisqu'ici, sur cette île, il y en a si peu qui se soucient de nourrir des chiens errants ?
Je n'ai rien fait pour aider ce pauvre chien. Je peux encore le voir dans mon esprit. Et son image ne va pas s'évanouir comme ça. Je me demande toujours ce qui lui est arrivé finalement, et quand ses souffrances vont-elles prendre fin. Et je continue à me détester pour ne pas lui avoir donné au moins le soulagement temporaire d'un bon repas.
Maitre, comment quelqu'un peut-il immédiatement traduire sa compassion en action sans se laisser retenir par toutes sortes de choses ?"
Chang Yen détacha son regard de mes yeux mouillés de larmes et répondit avec douceur : Traduire la compassion en action n'est pas le problème d'une seule personne, mais celui de l'humanité toute entière.
Quand une personne veut faire le bien, même si elle veut vraiment le faire, il y aura toujours des gens qui vont la critiquer. Les gens aiment critiquer et ils aiment montrer les autres du doigt — ces façons d'agir ne sont rien d'autre que des habitudes de l'espèce humaine.
Pour traduire la compassion en action, une personne doit être brave... elle doit être très brave.
Avec courage, elle doit entreprendre de vaincre les barrières psychologiques qui se dressent entre la compassion et l'action, et ne pas s'occuper des critiques et des points de vue des autres, mais faire ce qu'elle pense être juste et bien.
Après avoir fait le premier pas, elle doit tenir bon avec courage. Elle ne peut se permettre de perdre courage, elle doit au contraire le renforcer, parce qu'elle en aura besoin pour continuer sa tâche.
Dans ce monde, la souffrance est partout. En vérité, tous les êtres vivants souffrent... d'une façon ou d'une autre.
La souffrance et l'agonie que vous avez vu chez ce chien peut être facilement trouvée chez d'autres êtres. Le mauvais traitement qu'il a subi est celui que subissent beaucoup d'êtres vivants dans chacune des régions de ce globe.
Un bouddhiste respecte la vie elle-même, quelle que soit sa forme physique. Souhaitons qu'un jour vienne où chaque être humain voudra respecter les autres créatures vivantes.
Source : Bouddhisme Au Feminin
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